5ème jour : 10/02/2012
« Bon alors là… largué en territoire hostile. La carte ne nous est plus d’aucune utilité, elle est incomplète. Notre seul outil de navigation est ma carte mémoire qui contient les photos. Nous sommes… nous sommes… à COFFS HARBOUR ! »
Notes de l’auteur (ouais, c’est moi)
Ne voulant pas briser l’instant parfait de la fin du dernier épisode, j’ai quelque peu coupé la première soirée passée avec ma famille d’accueil. Alors flashback :
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Je tombe sur la maman uniquement. Elle m’explique que son fils a bel et bien 7 ans, qu’il est très excité mais qu’il est déjà rentré de l’école. Elle me dit aussi que Sonny a l’habitude de hurler énormément. Bon, bon, bon. Je lui raconte un peu ma vie sur le chemin (faudrait pas laisser un gros blanc s’installer) et on commence déjà à se faire des leçons de vocabulaire mutuellement (je lui parle de Bondi Beach et mets un quart d’heure à lui faire comprendre qu’elle est « clean », un mot que je connaissais parfaitement, en utilisant des moyens détournés : « There is no… er… things that you put in the trash… er… », enfin l’avantage c’est qu’en Anglais, y a deux mots que je n’oublierai jamais : « rubbish » et « clean »). En arrivant, l’insonorisation de la voiture ne masque pas les hurlements stridents des deux enfants qui m’ont fait un dessin par terre devant la porte pour dire « Welcome Matthis » et un dessin (by Harrison) pour dire qu’il espère que je vais enjoyer mon stay. Le soir, je raconte aux deux parents ébahis mes aventures à Sydney et je leur explique que je suis resté bloqué à Londres parce que la piste était gelée ! Les yeux ronds comme des soucoupes, la mère fait la traduction en Australien (une langue que je ne pratique pas couramment) à ses enfants. Je leur montre mes photos et ils restent scotchés devant mes magnifiques photos de mouettes (à bon entendeur). Tard dans la soirée, j’apprends à la maman à installer Skype, puis je m’en sers pour entendre les sons de voix connues.
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Ce matin, je me réveille l’esprit embrumé ; je sens une présence. Je relève ma tête lourde et je tombe sur une sorte de lémurien à gros yeux. Il me regarde. Il s’approche… oh mon Dieu ! C’est pas un lémurien, c’est pire. C’est Sonny, le frère cadet de Harrison. C’est le même, en plus petit, en plus roux. Qu’il est mignon. Ah, faites qu’il recule. Non, recule. Je veux dormir. Allez, technique « adulte » : je le regarde, feignant l’ignorance la plus totale : et c’est parti pour le 100 mètres moins de 5 ans toutes catégories. C’est la magie. Je dois lui faire peur, c’est pas possible. Enfin, prêt à faire face à mon destin, je me lève, appelé par les parents. Je me dirige immédiatement vers le grand jardin (si on peut appeler ça un jardin puisqu’il n’est délimité que par la lisière de la forêt), il paraît qu’il y a des wallabies tôt le matin. Effectivement, je tombe nez à truffe avec la bestiole en question. S’ensuit un gaspillage inadmissible de mon espace mémoire dans l’appareil photo.
Premier petit déjeuner en famille, rien de plus gênant qu’un petit déjeuner. On pue, on est fatigué, on est en pyjama, c’est tout juste le matin. Heureusement qu’il y a la vue magnifique de la terrasse et les perroquets et cacatoès qui viennent manger aussi, me permettant de continuer à gaspiller mon espace mémoire et mes piles. Alors, je vous présente quand même ma famille d’accueil : Steve, Samantha et leurs enfants Harrison (7 ans) et Sonny (3 ans). J’ai vérifié, je suis le seul à être tombé sur un correspondant de 7 ans. Même ma prof n’y croyait pas. Mais tout bien réfléchi, c’est peut-être mieux. Vous comprendrez tout ça dans une dizaine d’épisodes, quand je serai avec Connor.
Enfin c’est pas tout ça mais on a du boulot les amis, je dois m’habiller pour aller dans l’établissement de Harrison : Bishop Druitt College. La maman m’explique que je peux prendre de l’argent pour la cantine ou qu’elle peut commander. Je lui demande de commander, assez peu envieux de galérer comme un bolos. Nous partons. Sur le chemin, nous croisons des kangourous et la maman s’arrête pour me laisser prendre des dizaines de photos, indifférente aux protestations de Harrison qui se plaint qu’il va être en retard. Effectivement, nous prenons le bus de justesse, en sortant de la voiture dans l’anarchie la plus totale et en courant comme des bourrins. Le vieux bus scolaire du vieux cliché du bush australien ! Dépaysé de voir tous ces uniformes et surtout de ne pas croiser le moindre Frenchie, je commence sérieusement à stresser, surtout quand je vois les gens qui me jettent des petits coups d’œil furtifs, intrigués par l’absence d’uniforme. On arrive. Panique totale. Que vais-je devenir, où vais-je aller, pas un Français à l’horizon, seraient-ils carrément dans un autre établissement ?! Comme Harrison sait que je vais suivre les cours avec lui, il m’emmène dans sa classe. Bon. Si on omet le gros vidéoprojecteur au plafond et les baffles de chaque côté du mignon petit tableau, j’ai l’impression d’être projeté une dizaine d’années en arrière, même si c’est un peu moins ça me paraît tellement loin…
J’aperçois alors ma prof et me précipite vers elle après avoir peiné pour expliquer à Harrison que je reviens. Je ne savais alors pas que la formule est très littérale : « I’ll be back ». Elle me dit « Bonjour, alors ça se passe bien ? » Et moi de répondre, paniqué : « Naaan ! Je vais me tailler les veines ! » Elle m’explique donc comment ça va se passer, me dit d’aller rejoindre les autres dans la section des plus grands et de dire à Harrison que je ne vais pas suivre les cours avec lui. C’est mission impossible ! Il ne parle que l’Australien ! Je n’arrive pas à lui faire comprendre et il me regarde, candide. « Mais suis-moi, viens je vais te présenter mes copains ! » Finalement il comprend et m’emmène avec les autres, où on me confie à un collégien. Toute la matinée, on se rencontre et on suit les fameuses activités de découverte style « Bingo franco-anglais » etc. Chacun montre son petit exposé sur un quartier de Lyon, je suis assez fier de ma vidéo mais je bafouille lamentablement sur la taille de la place Bellecour, et j’ai oublié ma feuille de notes donc je suis obligé de l’afficher sur le mur, ça fait un peu gogol.
Tôt dans l’après-midi, je suis libéré et nous partons pour une marche dans la Rain Forest et ses… liches ou quelque chose comme ça, je ne sais pas comment ça s’écrit, petites sangsues qui vivent dans la terre et s’accrochent à vos orteils pour vous pomper jusqu’à la moelle. Nous goûtons devant un grand view point et finalement nous rentrons. Le soir, nous dégustons un barbie sur la plage. N’allez pas croire que nous nous sommes tapés des jouets en plastiques pour le dîner, un « barbie » est un barbecue en Australien. Prenant très à coeur mon rôle de doyen-des-gamins, je joue avec les nenfants jusqu’à tard sur la plage.