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17 novembre 2013 7 17 /11 /novembre /2013 18:00

09/08/2012


5ème jour :


            C’est aujourd’hui que nous quittons notre cher Chinatown Hotel pour une nouvelle expérience : le survival en milieu urbain ! En effet nous quittons notre nid sur des chapeaux de roues à dix heures, nos billets de train pour Chiang Mai en poche. Cependant, l’heure de départ dudit train étant fixée aux alentours de dix-neuf heures trente, nous sommes à présent sans domicile fixe, livrés à nous-mêmes, traînant nos quarante kilogrammes de bagages au cœur de la capitale. Ces derniers étant un peu encombrants (surtout sur une journée entière), nous commençons par nous en débarrasser en les déposant aux consignes de la gare. C’est à ce moment-là qu’intervient la question fatidique : « Et maintenant ? » En effet, et maintenant, qu’allons-nous faire ? Eh bien tout est prévu : on va…faire du shopping ! Ouééééé…


            Nous nous rendons donc en tuk-tuk à notre première étape : le Tokyu Department Store, un centre commercial où The Unstoppable laisse éclater une des petites obsessions qu’elle se crée avant le départ chaque fois qu’elle se déplace à plus de deux-cents kilomètres de chez elle : « la pashmînâ ». Par ce terme elle désigne un châle en pashmînâ, un duvet très précieux prélevé uniquement sur le cou de chèvres tchang-ra de l’Himalaya. Selon notre ami Wikipédia, la fabrication d’un seul châle nécessiterait la laine de dix chèvres. On comprend donc qu’il faut se montrer circonspect lorsqu’on investit dans une de ces parures, le prix sur le Net oscillant entre 2,99€ et 280,00€ pour le même vêtement des mêmes dimensions. La qualité du duvet dépend paraît-il de l’altitude à laquelle les chèvres sont élevées, car plus il fait froid plus elles produisent une laine de qualité pour se réchauffer. Toutes ces subtilités n’effraient pas une seconde The Unstoppable qui se lance à l’assaut de tous les stands et magasins de mode pouvant potentiellement proposer des pashmînâs de qualité.


            En attendant, nous n’avons toujours pas de quoi nous habiller. Car si nous sommes venus chiner au Tokyu, c’est aussi pour nous acheter des vêtements dont nous avons un besoin réel. En effet, avant notre départ, The Unstoppable s’était renseignée auprès de ses collègues sur les mœurs et les prix thaïs, et apparemment tous lui avaient assuré qu’elle trouverait partout des T-shirts à 2€ et pourrait s’habiller pour presque rien. Nous étions donc partis « une main devant, une main derrière », comme dit le JG, persuadés qu’on nous offrirait des T-shirts à chaque coin de rue. Jusqu’à présent, nous n’avions pas eu l’occasion de vérifier cette théorie et il était grand temps, ne serait-ce que par décence, de chercher de quoi nous couvrir afin de ne pas finir drapés dans notre seule dignité qui n’y survivrait probablement pas.


            Soudain, le JG sauvage lève le museau, hume l’air, balaie le centre commercial à cent-quatre-vingt degrés et s’arrête brusquement, solidement enfoncé dans le faux marbre. Son regard vague et inexpressif face à tant de slips push-up oranges, verts  et roses devient l’œil du prédateur, attentif et totalement concentré sur sa proie. Ne bougeant pas la tête d’un nanomètre pour ne pas desserrer l’étau de son regard, ne clignant même pas des yeux, cessant de  respirer, il lâche dans un souffle « Oh putain, y a un Starbucks. » Il s’élance alors vers sa proie avec la souplesse du félin, zigzaguant entre les badauds et se jette, tous muscles tendus, toutes pièces dehors sur le café, le grand choix de pâtisseries et la connexion Wi-Fi gratuite. Le Starbucks ne l’a même pas vu, c’est à peine s’il a entendu le bruissement de la caisse enregistreuse ou frémi en le sentant planter brusquement sa cuillère dans le café ; le JG est vainqueur : il savoure sa victoire et appelle ses congénères en touillant énergiquement et bruyamment ses trois sucres dans le café de sa victime. Le Starbucks deviendra notre oasis durant les deux heures que nous passerons dans ce lieu de perdition.


            Après cette petite séance de shopping, nous nous rendons au marché aux fleurs, un immense hangar sous lequel s’étalent pêle-mêle roses, œillets, chrysanthèmes, orchidées, pommes, oranges, bananes, ananas, litchis, gingembre, racines diverses, piments, asperges, chou-fleur, oignons, et autant de fruits dont on n’a jamais entendu le nom. Nous nous régalons visuellement devant ces tonnes de produits frais, parce que c’est beau et en plus c’est gratuit. Le lecteur attentif notera cependant que le marché aux fleurs est curieusement nommé, car si les fruits sont des fleurs, les racines et autres poissons ne poussent pas sur les arbres…quoique, vous savez, dans ces pays on sait jamais (‘sont pas comme nous, je l’ai toujours dit), et puis tout le monde sait que les poissons poussent sur les poissonniers.


            Une superbe nourriture spirituelle et visuelle, mais ce n’est pas ce qui nous maintiendra debout. Parce que c’est pas tout ça, mais à force de regarder des fruits et légumes toute la matinée Et ce n’est que vers quinze heures trente que le groupe cède à mes protestations et décide d’échouer dans un petit troquet au bord du fleuve pour acheter quelque chose à becqueter. Je déniche dans un sombre recoin de la carte un sandwich jambon-fromage et décide de tenter le coup, espérant qu’on ne m’apportera pas un bout de jambon gras et suant et du fromage jaune fluo entre deux bouts de pain blanc carré qui colle au palais, coupé en deux dans la diagonale pour faire comme s’il y en avait deux. Comme quoi, celui qui a dit « l’espoir fait vivre » a dû en tuer plus d’un.


            C’est sur cette misérable expérience de sandwich que nous reprenons le chemin de la gare. Avant de quitter Bangkok, il nous faut dire au revoir à un ami qui nous a accompagnés tout au long de ce court séjour à la capitale : le fashion-flawless café. Cette fois-ci je me risque à faire preuve d’originalité en prenant un chocolat chaud (décidément, je vis dangereusement) au lieu d’un Cocoa Kit-Kat, ce dernier étant moins adapté au climat du jour : pluie et froid relatif. Et c’est sans surprise que je découvre un super chocolat, grande quantité, crème chantilly sur le dessus avec un superbe motif de fleur dessiné au chocolat. Les amis, si ce Road Book peut vous pousser à découvrir la Thaïlande et que comme tout le monde vous visitez Bangkok, passez donc faire un tour au fashion-flawless, vous ne serez pas déçus.


            Après avoir attendu une vingtaine de minutes abrités de la pluie battante par un petit porche qu’un taxi se présente, nous finissons sous la pression de l’heure qui tourne par nous contenter d’un tuk-tuk qui entame une folle course sous la pluie et dans les embouteillages pour nous permettre de prendre notre train à l’heure. Entassés à l’arrière sur le siège conçu pour deux personnes de tours de cul standards, le  JG et moi-même profitons des embruns qui passent sous le petit toit en plastique, The Unstoppable calée bien au sec entre nous deux, au centre de la banquette. C’est un peu comme faire de la moto sans casque, sous la pluie. Nous  arrivons à la gare, passons chercher nos bagages à la consigne puis attendons notre train. Il se présente environ une demi-heure plus tard, nous embarquons et découvrons une nouvelle expérience qui apparemment n’a plu qu’à moi : le train de nuit thaï.


            Après le traditionnel stress intense et irrationnel de montée dans le train et de déambulation dans les couloirs à la recherche de notre compartiment, nous nous y glissons et nous installons. Le compartiment est conçu pour quatre et hormis les lits, le seul espace libre est un couloir de 50 centimètres de large, sur lequel s’ouvre l’entrée munie d’un rideau, qui permet à chacun d’accéder à son lit. Ces derniers se présentent sous la forme de deux mezzanines, une de chaque côté, et pour accéder aux lits du haut une échelle est fixée au fond du compartiment, contre une petite tablette et juste devant la fenêtre. Pour ne pas les cacher et en limiter l’accès, elle est conçue sur un axe central qui permet de la plier ou de la déplier à l’aide de poignées dans la longueur. Comble du luxe (car nous sommes ici en première classe, la seconde consistant en un seul grand compartiment où tout le monde dort ensemble dans la fraternité totale, sans climatisation), une petite prise est placée juste sous la tablette, sur laquelle je  branche ma petite multiprise de voyage (toujours avoir une multiprise sur soi) pour recharger les diverses batteries d’appareil photo et autres téléphones portables. Tout le confort de l’hôtel : lits, électricité, et toilettes tout confort dans le couloir, avec la chasse d’eau traditionnelle thaïe : le jet, aux nombreux avantages puisqu’il permet de gérer l’eau comme on le veut et de l’économiser, quand nous pauvres européens utilisons deux boutons utilisant chacun un volume d’eau différent. Et même, attention, la climatisation.


D’ailleurs n’y aurait-il pas quelque chose qui cloche avec cette clim ? Mais…je crois qu’on s’est trompés de wagon, on doit être dans un train de marchandises à wagons frigorifiques…non ? Ah non, c’est pour les gens ici… Nous cherchons quelques minutes le contrôle de la clim, persuadés que ça ne peut être que le précédent utilisateur du compartiment (certainement un esquimau masochiste schizophrène avec un radiateur greffé sur le ventre) qui a tripoté la clim, mais nous comprenons qu’il n’y a pas de contrôle, ni même de bouton off… Mais alors c’est partout pareil ?! Eh oui très vite des tactiques de survie circulent de compartiment en compartiment, une sorte de fraternité naît entre tous les étrangers qui se donnent des astuces pour ne pas mourir d’hypothermie : la grande technique, inventée par MacGyver (qui se trouvait justement là par hasard, quelques compartiments plus loin), est d’utiliser les sacs plastiques dans lesquels sont rangées les couvertures propres, dont on fera par ailleurs un usage intensif, pour bloquer la sortie de l’air glacial en les scotchant au plafond avec des autocollants à bagages. Sacré MacGyver, toujours l’astuce pratique et pas chère en milieu hostile. Cette technique ne  suffisant pas, chacun sort son vêtement le plus chaud, et nous voilà emmitouflés, The Unstoppable et moi-même dans nos sweats respectifs, et le pauvre JG, encore tout malade, dans son gros pull orange, une écharpe autour du cou, une autre autour de la taille pour empêcher l’air de passer sous son pull, capuche baissée, sous toutes les couvertures qu’il a pu rassembler, si bien que la seule chose qui témoigne encore de sa présence est un petit nez gouttant et tremblotant qui dépasse entre une couverture et une capuche.


C’est alors qu’arrive le réconfort, le bonheur de toutes vos situations, la petite flamme dans les ténèbres : la bouffe. Une gentille dame vient nous apporter un plateau fait pour se caler entre deux lits, débordant de victuailles plastifiées chaudes ou crues. Ils avaient d’ailleurs pensé à moi et avaient caché un piment rouge au milieu de ma salade pour me réchauffer. The Unstoppable n’en avait pas besoin attendu qu’elle a sa propre technique pour se réchauffer : une bouteille d’un litre de Chang beer, presque un emblème de ce voyage, qu’elle attaque avec le JG et finira toute seule dans son coin.


Une heure et quart après l’horaire annoncé, soit à 20h45, le train s’ébranle tandis que les rideaux et les yeux se ferment doucement. Prochain arrêt : Chiang Mai...

 

Photos!

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commentaires

P
<br /> Mais oui mon This je sais que tu préfères " bourlinguer" plutot que buller au bord de la mer ou de la piscine, c'est ton côté actif, ta soif de découvrir  autre chose et je suis très très<br /> fier de ta personnalité .<br /> <br /> <br /> GROS BISOUS<br />
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M
<br /> Mon loulou excuse moi je n'ai plus d'avertisseur de "nouveau commentaire depuis que nous sommes passés de Numéo en Ozone " mystère...! et en plus notre esprit était ailleurs ....bycause<br /> toutounet...<br /> <br /> <br /> Cette partie de voyage est terrible rien que la pluie dans le tuk-tuk je suis gelée...puis survient le froid dans le train ce sont des clims pour les américains!! Voyage très vivant et plein de<br /> surprises ...j'attend la suite<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />  <br />
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C
<br /> J'adore la métaphore de la baguette ! ET LE COMTE !!! Mon petit Comté d'amour qui me manque bien !<br />
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M
<br /> @MOUCHE/POUDOU : Mais oui c'étaient des vacances, d'ailleurs je préfère mille fois ce genre de vacances plus ou moins aventureuses à trois semaines dans un hôtel coupé du monde extérieur sans<br /> rien voir du pays ; ceci dit c'est plutôt agréable après un tel périple de pouvoir se reposer tranquillement au bord de la mer, en particulier dans un hôtel de luxe de Phi Phi Island. C'est<br /> pourquoi nous mixons savamment les deux pour obtenir des vacances à la fois trépidantes, pleines de souvenirs et de découvertes et reposantes. Si je devais comparer ça à un autre élément<br /> primordial de ma vie, je dirais que c'est comme une délicieuse baguette de pain encore chaude, fraichement sortie du four : faut que ce soit croustillant à l'extérieur et moelleux à l'intérieur,<br /> et pour mériter le moelleux il faut manger le croustillant, par ailleurs indispensable et même délicieux avec du comté.<br /> <br /> <br /> @Clo : Merci beaucoup, bah d'ailleurs merci à tout le monde pour votre soutien, je me mets justement à la suite...Maintenant là, tout de suite. Ou presque.<br />
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C
<br /> Génial, comme toujours ! On en veut encore !<br />
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